Spotify : intelligence artificielle et faux groupes
- Rédaction TST Radio
- il y a 11 minutes
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Alors que la musique générée par intelligence artificielle (IA) s’installe dans nos habitudes d’écoute, une question brûlante agite le monde du streaming : Spotify laisse-t-il volontairement prospérer des morceaux créés artificiellement, sans les identifier comme tels ? Le cas du groupe fictif The Velvet Sundown remet la question au centre des débats.
The Velvet Sundown : un groupe vintage... totalement artificiel
Début juillet 2025, ce mystérieux groupe de rock psychédélique a fait sensation sur la plateforme. Propulsé par les algorithmes de Spotify, il a intégré plusieurs playlists populaires, cumulant plus d’un million d’auditeurs mensuels en quelques jours. Deux albums au son vintage, une esthétique soignée rappelant les années 70… Tout semblait authentique.
Jusqu’à ce que la supercherie soit révélée : The Velvet Sundown est un projet musical généré par l’IA, soutenu par une direction artistique humaine. Les pochettes d’albums et visuels promotionnels avaient été créés via des outils de génération d’images artificielles. Une révélation qui a interpellé autant les amateurs de rock indépendant que les professionnels du secteur musical.
Spotify et l’IA : une stratégie floue ?
Ce n’est pas la première fois que Spotify est accusé de laisser circuler du contenu généré par l’IA. En 2022 déjà, le quotidien suédois Dagens Nyheter identifiait plus de 800 faux artistes dont les morceaux trônaient dans des playlists très écoutées. Plus récemment, une enquête de 404 Media a révélé que des titres synthétiques avaient même été associés à des pages officielles d’artistes décédés, comme Blaze Foley, sans autorisation des ayants droit.
Ces contenus artificiels ne sont pas toujours identifiés comme tels, et apparaissent dans les recommandations de nombreux utilisateurs sans qu’ils le sachent. Une situation que certains dénoncent comme étant trompeuse, surtout lorsque l’on sait que ces morceaux sont parfois insérés dans des playlists Spotify, au détriment d’artistes indépendants bien réels.
Des "faux artistes" pour remplir les playlists
Dans son ouvrage Mood Machine, la journaliste américaine Liz Pelly évoque l’existence d’un programme interne baptisé Perfect Fit Content, dont la mission serait de fournir à la plateforme des "contenus parfaitement adaptés". Autrement dit, de la musique d’ambiance générée à bas coût, souvent créée par des artistes fantômes ou des outils d’intelligence artificielle, destinée à remplir silencieusement les playlists les plus streamées.
Selon Liz Pelly, un ancien employé de Spotify aurait confirmé que certains dirigeants partaient du principe que l’utilisateur moyen ne ferait pas la différence entre un artiste réel et un titre généré par l’IA. Spotify a bien sûr démenti officiellement ces accusations, mais le doute persiste.
Un enjeu éthique et économique
L’arrivée massive de morceaux générés par l’IA sur Spotify bouleverse non seulement la perception de l’authenticité artistique, mais soulève aussi des questions économiques. Ces titres artificiels, parfois créés en interne ou via des sous-traitants, ne nécessitent pas de droits d’auteur traditionnels. Une stratégie qui pourrait réduire les coûts pour la plateforme, mais aussi affaiblir la rémunération des vrais artistes déjà malmenés par les modèles de répartition du streaming.
À l’heure où l’intelligence artificielle bouleverse tous les secteurs créatifs, Spotify semble jouer un jeu d’équilibriste entre innovation technologique et responsabilités éthiques. Pour les auditeurs, difficile de savoir si ce qu’ils écoutent est le fruit d’un musicien passionné ou d’un algorithme bien entraîné.